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Full text of "La baie d'Hudson [microforme] : exploitation proposée de ses ressources de terre et de mer : nouvelle colonie, chemin de fer pour s'y rendre"

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LA BAIE D'HUDSON 



> • < 



Exploitation proposée de ses ressources 
de terre et de mer 



Nouvelle Colonie. Chemin de fer pour s'y rendre 



Par C. BAILLAIRGE, A. M. 

Areh., arpt . ingr. — Ex-prés, de Iti Société de Oêogr. de Québec. 
Membre de la Société Royale du Canada, etc. y etc 



Au nord de Québec est une vaste baie découverte en 1610 
par Henry Hudson et qui porte le nom de ce hardi navigateur. " 

Elle s'étend du 51 ° au 63 "^ de latitude nord, mesurant 
dans cette direction 825 milles ; et du 78 '^ au 96 '^ de loiigi- 
tude ouest, ce qui lui donne une largeur d'environ 630 milles. 

Sa superficie est de 397,000 milles carrés : par exemple, «ix 
fois celle du golfe St- Laurent ; cinq fois celle de tous nos 
'grands lacs réunis : le Supérieur, le Michigan, le Huron, l'Erié, 
l'Ontario, avec la baie Géorgienne de sureroil (voir rapport du 



Min. des Tr. P. pour 1886-87 page 14 par G.-F. Baillairgé, Ecr., 
alors Ministre adjoint du Dépt.) 

Atteignant sensiblement les largeur et longueur du golfe du 
Mexique, la baie d'Hudson a trois fois l'étendue de la Mer 
Caspienne ou de la Mer Noire, deux fois celle de la Mer Eouge, 
près de la moitié de celle de la Méditerranée entre l'Europe et 
l'Afrique. , , . . - * 

Mais peut-être eu saisirez- vous mieux le vaste parcours en 
tous sens, si je vous dis que cette superficie est de 26500 fois 
.elle du havre de Québec entre Lévis, Bcauport et l'Ile 
d'Orléans ; et ce n'est pas peu dire, car le havre de Québec est 
célèbre parmi ceux du monde entier. 

Vous y avez vu entrer il y à 20 ans, plus de 1600 navires 
durant une seule saison ; dont 400 à la fois, eussent-ils été 
d'une longueur de 500 pieds en moyenne, — celle de nos 
vapeurs océaniques d'aujourd'hui — avec à chacun un espace de 
1100 pieds de diamètre ou de plus d'un million de pieds en 
.superficie ; 400 de ces vaisseau.x, dis-je, pourraient y manœu- 
vrer à la fois, dériver an courant, y éviter comme l'on dit en 
terme de marine, c'est-à-dire v exécuter chacun et tous 
ensemble un mouvement complet de rotation sur ses ancres. 

Cette mer intérieure est vaste, messieurs, comme tout ce qui 
tient du Nouveau Monde : nos lacs à côté de ceux de l'Ancien 
(.'ontinent; nos fleuves : les Amazones, le St-Laurent, le^Missis- 
.^ippi mis en parallèle avec les filt-ts d'eau de l'Europe ; vaste 
encore comme le sont nos Rocheuses, nos Sierras à côté des 
Pyrénées, des Alpes ; le glacier Muiv de l'Alaska, grand ù lui 
.seul comme tou.s ceux des Alpes réunis; comme les Geysers de 
de la vallée Yellowstone, de 50 pieds de diamètre et lançant 
leurs eaux bouillantes à une hauteur de 200 pieds, h côté des 
eaux thermales de l'Islande ; comme l'Amérique elle-même 
lomparée à l'Hlurope et comme promet de l'être l'exposition 
(-olombienne ù (:ôté de toutes celles que le monde a vues 
jusqu'à ce jour. 

Pourtant messieurs nos grands lacs sont grands, l'estuaire du 
'^t-Laurent I\st davantage ; mais comparés avec la Baie 



— 3 — 

d'Hudaon, c'est le Saguenay, tout majestueux qu'il soit, avec 
ses côtes de 1800 pieds de hauteur, comparé au Colorado où il 
faudrait entasser trois fois sur lui-même le cap "éternité, la 
"trinité" pour approcher de l'altitude vertigineuse des flancs de 
ce canion le plus grandiose du monde entier. 

Mais si tout est grand ici, il ne faut point qu'en se laissant 
devancer par les habitants d'un autre pays, dans l'accomplisse- 
ment de l'œuvre que je viens ce soir vous proposer, l'Amé- 
rique, le Canada soit en même temps le pays des moins intel- 
ligents. , _. ^,, .,. ;, . . - ., u 



On a conçu depuis quelques années le projet d'utiliser la 
voie de la baie et du détroit d'Hudson pour écouler les produits 
de nos prairies du Nord-Ouest qui y aboutissent de ce côté, 
afin de les expédier en Europe par un trajet plus expéditif, plus 
court de quelques centaines de milles, que celui que l'on suit 
aujourd'hui par nos lacs, nos che-mins de fer, le St-I.aurent, etc., 
pour atteindre les ports de mer du Canada et des Etats-Unis. 

Le Gouvt. Fédéral saisi de l'importance de la chose a déjù 
dépensé durant les années 1884, 85 et 86 une somme de 
$122,000.00 pour mettre la question à l'étude. l.>urant cha- 
cune de ces années, résume M. Bdllairgé âéy\ nommé, un corp.^ 
expéditionnaire sous la direction du lieut. Gordon fut envoyé ù 
bord d'un navire à vapeur au détroit et à la baie d'Hudson 
pour constater leur navigabilité pour les fins du commerce; 
pour y prendre des observations exactes et les renseignements 
nécessaires au sujet de la nature et de l'étendue des glaces, des 
vents, des courants prédominants, de la date où il serait pos- 
sible d'y pénétrer le jirintemps ou d'en sortir l'aufomu'-, et 
aussi relativement au climat, à la géologie, aux pêcheries et au.v 
ressources des parages avoisinauts. 

Durant la première année, le lieut Gordon choisit les postes 
d'observation le long du détroit et de la haie d'Hudson, y éii- 
iïea les bâtiments nécessaires et v installa des observateurs qui 



— 4 — 

prirent et enregistrèrent chaque annt?e les observations pres- 
crites, suivant le mode qui leur fut désigné. 

Du 27 juillet au premier août de la dernière année, on fit un 
relevé du havre de Churchill et du port Nelson, où devait aller 
aboutir le chemin de fer proposé de Winnipeg.dans la prévision 
déjà mentionnée d'un écoulement des produits du Nord- Ouest 
par la voie d'Hudson si elle était trouvée favorable ; puis, 
comme la clôture de la navigation approchait, on procéda du 8 
au 30 sept, au démontage des observatoires qui avaient été 
•érigés, et au rembarquement des observateurs et du matériel 
avec les approvisionnements non utilisés aux divers postes- 
Le retour à Halifax eut lieu le 10 oct. suivant. 

Un rapport de chaque expédition fut transmis chaque année 
par le lient. Gordon au Ministère de la Marine par qui la pu- 
blication en a été faite ainsi que des cartes annexées à ces rap- 
ports. 

Ce sont des " livres bleus " Mesdames, que personne ne lit à 
peine, mais qui pullulent d'intérêt et de situations émouvantes; 
c'est plus beau que du Zola. C'est dans ces livres publiés à 
grands frais par les Gouvernements qu'on trouve ces féeries, 
ces merveilles du Colorado, de l'Arizona, de la vallée Yosamite, 
aujourd'hui le " parc national " des Etats-Unis, le parc des 
géants du nouveau monde. C'est par ces rapports d'explorations 
que l'on conuait aujourd'hui et seulement depuis 40 ans ù 
peine l'existence au Maripoza de ces grands arbres de 300 à 
400 pieds de hauteur, d'un diamètre de 30 à 40 pieds et qui 
par leurs couches annuelles et concentriques révèlent une exis- 
tence de 40 à 50 siècles. Mais ce n'est pas ici l'endroit de 
vous parler de ces choses il faut suivant le dicton populaire 
rev?nir à nos moutons. 



Le "Neptune" un navire en bois appartenant à MM, Job 
frères de Saint Jean de Terreneuve, fut affrété pour la 
première expédition et fut manœuvré sous la direction du 
«capitaine W, Sopp par un équipage de marins expérimentés. 



Ce vaisseau était construit pour la pêche du phoque. Les 
oflBciers de l'expédition étaient 1 géologue et médecin, 8 obser- 
vateurs, 1 photographe, 2 charpentiers et 12 manœuvres des 
postes d'observation — 24. Au nombre des observateurs était 
notre concitoyen M. Ashe attaché en permanence h l'observa- 
toire de Québec près des plaines d'Abraham. Ce monsieur 
passa une année près dans le détroit d'Hudson à un endroit 
connu aujourd'hui sous le nom de Ashe inlet (l'anse Ashe) 

Pour les expéditions de 1885 et 86 on se servit du vapeur à 
hélice de sa majesté, le "Alert" d'environ 700 tonneaux, d'une 
vitesse de 8| nœuds à l'heure par un temps calme, ou d'une 
vitesse moyenne de 6 nœuds ( 7 milles ) en consommant de 4 
à 6 tonnes de charbon par jour. Au milieu des bancs de glace 
on n'alluma qu'un feu et l'on eut une vitesse de 4 nœ-uds (près 
de 5 milles) à l'heure en ne consommant que 2 tonnes de char- 
bon par jour. 

Ce navire avait été construit pour l'expédition arctique de 
1876 sous le commandement de Sir George Nares. 

Les officiers du navire pour 1885 étaient 1 commandant. 
T officier subalterne, 1 mécanicien en chef, 1 mécanicien subal- 
terne, 1 charpentier — 6. L'équipage se composait de 2 maîtres 
d'équipage, 12 marins, l lampiste, 6 aides-mécaniciens, 1 
maître d'hôtel, 1 maître cuisinier, 2 sous-maîtres d'hôtel, 
] aide-cuisinier — 26. Les membres de l'expédition étaient 
1 géologue-médecin, 1 assistant, 5 observateurs — 7. Manœuvres 
(les postes d'observation — 12. L'Editeur du Times de Witmipeg, 
délégué de la Cie du chemin de fer projeté entre Winnipeg et 
la Baie d'Hudson dont j'ai déjà dit un mot. — total 52. 

L'expédition de 1886 comptait 1 commandant, l capitaine, 
'6 seconds, 1 maître d'équipage, 20 marins, 1 lampiste, 2 méca- 
jiiciens, 6 chauffeurs, 2 graisseurs, 5 maîtres d'hôtel et cuisi- 
niers, 1 météorologue assistant — 43. 



Les observations météorologiques prises à bord du Neptune 
en août 1884, à la baie Nackvak à 100 milles en aval de l'em- 



_ 6 — 

boiichure du détroit d'Hiidpon font voir t|ue la température 
moyenne au cap Chudleigh était de 39 ° pour août, 33 *^ pour 
sept, et au détroit de Belle- Ile de 49 ° et 43 ® pour les mêmes 
mois, c-à-d 10 ° de froid de plus au détroit d'Hudson ; m is 
moins de jours de brume pour ce dernier. 

La température moyenne qui a été constatée chaque mois ne 
laisse aucun douto de l'impossibilité de naviguer le détroit de 
novembre h avril inclusivement. En mai, juin, juillet, le 
détroit contient une grande quantité de glace, et comme la tem- 
})érature moyenne à l'extrémité est du détroit est de 25 ^ Far. 
en mai ou de Sj ° au-dessous du point de congélation de l'eau 
salée, la débâcle ne commence point durant ce mois. 

Eti juin et juillet lorsque la température s'est élevée à 35 - 
et 40 ° , la glace devient cellulaire et fond rapidement. Suivant 
les rapports des observateurs et l'expérience acquise, ce n'est 
qu'après le mois de juin et partie de juillet, que la fonte et la 
débâcle de la glace sont suffisamment avancées pour que l'on 
puisse naviguer le détroit pour les fins du commerce. 

Il y a des banquises de glace en toutes saisons de l'année 
dans le détroit d'H-idson, surtout près de la côte nord où Fou 
en a vues d'échouées dans 80 à 100 brasses d'eau et dont l'épais- 
seur, la hauteur cUn-ait par conséquent être de 5 à 700 pieds, 
mais en août et septembre il y a moins de glace dans le détroit 
qu'en tout autre temps de l'année. La jeune glace vive et 
azurée de la saison a de 4 à 7^ pieds d'épaisseur de l'embou- 
chure ouest du détroit à l'isle de Marbre située à l'ouest de U 
baie. 

Vers le couinif^ncement de juillet on lencontre de grands 
amas de vieille glace " arctique " très épaisse ; celle-ci est le 
produit de plusieurs hivers et mesure de 40 à 50 pieds d'épaii?- 
seur. 

La tpiantité da glace qui traverse l'embouchure du détroit ot«" 
énorme : dans le printemps elle forme quelquefois une barrière 
impénétrable qui a une étendue de 50 à 100 milles à la fois 
entre rembouchure d\i détroit et les eaux libres de l'océan. 

Pendiiut les années ordinaires la périole de la navigation est 



— 7 — 

limitée du 15 juillet au 15 oct. — 3 mois — mais des navires 
solidement construits, avec propulseurs de petites dimensions 
et tirant peu d'eau pourraient y naviguer peut-être deux se- 
maines de plus le printemps et l'automne ou en tout 4 mois 
tout au plus au lieu de 3. 

La date moyenne de 116 arrivages consécutifs des navires 
de la C'ie de la Baie d'Hudson, à la Factorerie de York a été le 
4 se'')t. Parmi ces 116 arrivages, 48 étaient en août, le 6 
août étant la date la moins avancée, et le 7 oct la date la plus 
reculée ; dans ce dernier cas le navire hiverna dans la baie. 



Mais si le détroiu d'Hudson n'est ouvert, quoique toujours 
obstrué de glace, que pendant seulement trois mois de l'année, 
c"î qui rend l'exploitation commerciale des ressources de la baie 
])ar voie maritime, difficile et risquée; il n'en est pas ainsi de la 
baie elle-même où les eaux sont plus chaudes que dans le 
<létroit, dû en partie à ce que la latitude moyenne ou centrale 
de la baie est de quelques 7 ® inférieure à celle de l'embou- 
chure du détroit, distance de près de 500 milles au nord, et à ce 
([ue les grandes nappes d'eau profonde, sont tempérées et par la 
chaleur intérieure de la terre qui s'y exale, et y agit par con- 
vection comme l'eau se chauffe au contact du feu dans une 
chaudière c'est-à-dire de bas en haut; tandis (|u'en même temps 
l'eau étant un mauvais conducteur, le froid à sa surface ne le 
l)énètre point aussi profondément, aussi vite qu'il entre dans 
le sol des continents et que y entrât-il, il s'y forme de suite, 
('omme sur nos rivières une couverture de glace i|ui dérobe 
l'eau à ses effets et empêche sa chaleur de s'exaler à la surface, 
et de se perdre dans l'atmosphère. 

Dans le détroit, la température de l'eau, à sa surface a varié 
de 32. ° à 33.1 ° pendant le voyage du Neptume en août et 
sept. 1884, tandis que dans la baie elle était de 41 ° à Chur- 
chill. 37.7 ^ d 100 milles au Nord Est de York, 39.4 ° à l'Ile 



_ 8 — 

«Je Marbre et de 36 ° à l'extrémité de l'îsle Mansfield vers 
l'entrée nord-est de la Baie d'Hudaon. 

Il est reconnu maintenant que la haie est navigable de boane 
heure en juin, et le facteur à Churchill affirme que la glace 
dans la Baie d'Hudson ne s'étend jamais assez loin du rivage 
pour qu'on ne puisse voir l'eau libre du littoral ; et que cette 
distance est peu considérable, vous pouvez, vous avez pu vous 
en convaincrai lorsqu'en voyageant entre Québec et l'Ile 
•l'Orléans, la simple largeur d'un mille de glace qui vous sépare 
des eaux du St-Laurent suffit pour vous en dérober la vue. 



A Belle-Ile la température de l'eau était de 41.6 ^ le 2;"» 
juillet et à l'entrée du détroit d'Hudson de 34.7 ° le 4 août de 
la même année, différence de 7 ° , tandis qu'à Churchill, au 
centre de la baie d'Hudson et 7| ° de latitude plus au nord 
que Belle-Ile la différence n'est que de | ° à 2 '^ tout au plus. 

Les courants, et marées dans le détroit d'Hudson augmen- 
tent grandement les risques de la navigation. Ces courants 
ont une vitesse de 3 à 6 nœuds à l'heure ; ils sont très rapides 
en certains endroits et un vaisseaux luttant c(jntre ces courants, 
au milieu de glaces flottantes, courrait risque de grandes 
avaries, celui même de sombrer. 



Une autre difficulté, et celle-ci, dit le lieut. Gordon, est la 
plus sérieuse que je puisse prévoir : c'est la perturbation de 
î'aiguille aimantée, surtout dans les parages dangereux avoisi- 
nant l'ile Digges. On réussit ordinairement à doubler l'ile 
Alansfield au moyen de la sonde, mais il n'en est pas ainsi de 
l'île Digges où les navires sont exposés a\\ danger de faire nau- 
frage, h. moins d'une vigilance continuelle jour et nuit et en 
prenant toutes le° précautions possibles. 

L'inclinaison de l'aiguille est de 86 '^ à Tîle Digges à l'extré- 



— 9 - 

mité ouest de la Baie d'Hudson, où l'on approche du pôle ma- 
gnétique situé parait-il ('ans I9 territoire de la Cie et que Sir 
John Ross place au 82 - de latitude N. Cela indique une grande 
force verticale, pendant que la force horizontale s'approche du 
point où elle va disparaître. Dans la traversée entre le 
Royaurae-Uni et la Baie d'Hudson, l'inclinaison augmente de 
67 "^ à 87 "^ environ ou de 20 ® . Le seul moyen de naviguer 
avec sûreté le détroit, est d'avoir recours constamment à la 
sonde et d'être continuellement en vigie parceque l'estimation 
de la route par l'aiguille aimantée est très souvent loin d'être 
exacte. 



Les poissons et mammifères que le commerce peut exploiter 
sont lo la haleine franche " balena mysticctua " qui est la 
plus recherchée à cause du haut prix de ses fanons. On oh- 
tient une tonne de fanons et de 20 à 40 tonnes d'huile d'une 
baleine de 50 à 60 pieds de longueur suivant l'épaisseur du 
lard qui varie de 6 à 18 pouces, 2o La haleine blanche "begula 
cafodon" la baleine par excellence de la baie d'Hudsim. On 
en voit de grands troupeaux monter avec la marée, chaque jour, 
dans les rivières Churchill, York et Nelson. 

De toutes les pêches qu'exploite la Cie, celle-ci est la plus 
considérable. 

Chaque marsouin va\it à peu près $100.00. En 1883 la Cie. 
en a pris environ 200 dans une seule marée à Churchill, affaire 
de $20,000.00 d'un seul coup de main. On les fait échouer 
sur les battures des anses où la marée monte de 10 à 15 pieds 
et où on les retient au moyen de rets à trap})es, jusqu'à ce que 
l'eau disparaisse ; le marsouin leste alors à sec sur les rochers 
ou le sable. 3o Le narval monodon Monoceros ou " l'uni- 
come," un cétacé qui a beaucoup de lard pour sa grosseur ; la 
corne du mâle mesure souvent jusqu'à 5 pieds de longueur et, 
comme elle est d'ivoire, se vend à un prix élevé. 4o Le morse 
ou cheval marin " tHcIiecus rosmarinus " que l'on trouve en 



10 — 



troupeaux très nombreux, généralement à peu de distance du 
rivage, au nord de l'Ile de Marbre où la Cie. envoie de Chur- 
chill, chaque année, deux vaisseaux qui n'ont jamais manqué 
de se procurer, dans l'espace de quelques semaines, autant de 
lard, d'ivoire et de peaux qu'ils pouvaient en porter. En 1884 
on a pris de 20 à 30 de ces pinnipèdes dont la valeur s'élevait 
;i $7,000.00 ou plus. 5o Les phocides " phocae " de diverses 
(ispèces. 

Dans la baie on rencontre des phoques de presque 
toutes les familles, mais pas en aussi grand nombre, au prin- 
temps que sur les côtes de Terre-Neuve ; les Esquimaux néan- 
moins en tuent beaucoup et en utilisent la chair pour leur 
nourriture et la peau pour leurs vêtements, leurs canots "kayoks" 
et leurs huttes. 6o L'Ours polaire " ursus maritlmus. " 
Quoique ces animaux soient nombreux, il est assez rare qu'on 
«n voie dans le mois de juin, lorsqu'ils s'aventurent sur les 
glaces flottantes à la recherche de phoques qu'ils capturent 
pendant qu'ils sont endormis. On ne connaît point de cas où ils 
aient attaqué l'homme, malgré leur férocité réputée. 7o Parmi 
les poissons c'est le saumon et la truite seulement que l'on ex- 
porte, quoique l'on pêche des poissons blancs d'une excellente 
qualité dans la rivière Nelson, et autres cours d'eau où ils choi- 
:iissent de préférence l'endroit où l'eau salée se mêle à l'eau 
douce. 8o Quant à la morue qui est abondante dans le détroit 
à l'est de la baie d'Ungava, il ne parait pas y en avoir dans la 
baie d'Hudsou ; au moins on n'en a pas trouvé jusqu'à présent. 



Cette pêche de la baleine est exploitée par les habitants des 
Etats-Unis depuis plus de 40 ans, principalement dans le bassin 
de "Rowe's Welcome" au Nord de la baie d'Hudsou, Les ba- 
leiniers surtout du Massachussetts et du Connecticut partent 
ordinairement des ports du New-Bedford et de New-London, 
en juillet et se rendent à l'Ile de Marbre près de la côte N,-0. 
de la baie d'H. où ils arrivent en septembre et passent l'hive 



— II 



dans un port jusqu'au mois de juin suivant ; ils dégagent alors 
leurs vaisseaux de la glace en la sciant, croisent ensuite dans 
la baie pendant le mois de juillet, puis ei;fin ils se dirigent au 
nord, vers les campements de pêche, d'où ils reviennent vers 
le 1er sept, avec leurs cargaisons de lard et de fanons, dont on 
estime la valeur à plus d'un millions de piastres, pendant une 
période de 25 ans et cela en prenant une moyenne de seulement 
10 baleines par année et de S4000.00 par baleine. 

Suivant le rapport des commissaires des pêcheries des 
Ktats-Unis, pour 1875-76 leurs baleiniers ont fait pas moins de 
ôO voyages à la baie d'H. et en ait rapporté des cargaisons 
d'une valeur d'au moins $1,371,000, c-à-d. en moyenne de 
$27,240.00 par voyage et par vaisseau pendant les onze années 
antérieures à 1871. 

)-a valeur totale de l'huile seulement, obtenue et exportée de 
la région de la baie d'H., par la Cie de ce nom et les 
])êcheurs des Etats-Unis, eu 1883 est estimée à $150,000.00 et 
a $! 500,000 durant le Cours des 10 demi êtes annéss. 

D'après le rapport de 1886 par le lient. Gordon le nombre de 
T)aleiniers expédiés de la Nouvelle Angleterre à la baie d'H. et 
au Golfe de Cumberland et leur cargaison moyenne de 1846 à 
1876 ont été comme suit: 113 vaisseaux ou de 4 à 5 par 
année pendant 25 ans : 14.3 barils de spermacéti, moyenne par 
année de chaque uavirt, 496 barils d'huile de baleine, 7965 
livres de fanons de baleine. La cargaison moyenne évaluée 
aux prix actuels serait dit Gordon d'environ $47,200.00. 

De 1846 à 1876, 16 de ces baleiniers ont péri. Mais si l'on 
considère que leur grandeur moyenne n'était que de 240 ton- 
neaux, on verra que les profits réalisés ont été très grands. 

A part la pêche de la baleine, ces baleiniers traitent, sans 



permis, avec les Esquimaux, pour les peaux de bœufe-mus- 
qués et autres fourrures, en concurence avec la Cie de la baie 
d'Hudson qui paye les droits imposés par le tarif protecteur du 



12 



Canada, sur tous les articles qu'elle importe pour le commerce 
(ie cette région. En 1885 les droits qu'elle a payés aux postes 
de York et de Moose s'élevaient à $22,000,00. 



Un autre fait qui mérite l'attention du Gouvt du Canada 
c'e^t que la olonie de Terre-NiUVii perçoit des droits sur les 
articles consommé:^ au fort Ghimo dans la baie d'Ungava, 
détroit d'H., ou vendus aux indigènes de l'intérieur du 
Labrador, quoique cette région se trouve sur le territoire cana- 
dien, ceiui de Terre-Neuve étant borné comme suit : "En 
partie, à l'ouest par la ligne du 57 ® .9' de longitude ouest, 
courant vrai nord, à partir de Blanc Sablon sur la parallèle de 
50 ° .25 de latitude N., sur le détroit de Belle-Ile, comprenant 
Blanc Sablon et les Iles de Bois, "Woody Islands") jusqu'à la 
parallèle de 52 '^ de latitude N. et de la le long de la côte est 
du Labrador jusqu'au Cap Chudleiijh qui est situé sur la paral- 
lèle de 60 ® 37* de lat. N. et sur la ligne de 65 ° de long. O. à 
l'emboucliure du dédroit d'H. — Pour les limites de la partie 
du Labrador sous la juridiction du Gouvt de Terreneuue, voir 
l'annexe du 'Journal de l'Ass. Lég. de Terreneuve 1864 
page 614. 

Ceux qui désirent avoir une idée générale et exate des 
autres pêcheries du Canada peuvent consulter la brochure très 
intéressante et instructive de L, Z. Joncas M. P. pour le comté 
de Gaspé, et publiée par le ministère de l'Agriculture en 1886, 
dans la quelle il démontre que le Canada possède les pêcheries 
les plus étendues et les plus riches de l'univers. 



Les ressources minérales ainsi que ITiistoire naturelle de la 
baie et du détioit d'Hudson sont traitées par le Dr Bell, sous- 
directeur de l'exploration géologique du Canada, qui remplit 
les fonctions de médecin et de géologue pendant chacune des 
trois expéditions. Ses rapports sont annexés à ceux du lïeut. 



— 13 — 

Gordoîi. Suivant ces rap]X)rt3 le gneiss prédomine sur les 
côtes du détroit, et les échantillons de roches obtenus sur la 
côte ouest de la baie indiquent que la formation huror.ienne 
couvre une grande étendue de la région de la liaic d'Hiidson : 
c'est dans cette formation surtout que l'on trouve les matériaux 
économiques. 

Dans son rapport de 1888 h Dr Bell donne l'énnmératiou 
de ces minéraux qu'il doerit ainsi que les localités où ils se 
trouvent : Fer, argihî ferrugineux, cuivre, plomb, zinc, molyb- 
dène, argent, or, gypse, sel, hématite on pierre de savon, lignite, 
anthracite, pétrole et asphalte, mica, graphite, a^beste, fer chro- 
maté, apatite, pyrites de fer, chaux servant au ciment hydrau- 
lique, pierres de construction, sable de verrier, argiles réfrac- 
taires, argiles à brique, sable à mouler, marne coqnillère pour 
les engrais, ochre, tourbe, dalles, ardoises à toiture, et autres 
substances, ainsi que des pierres ornementaires et des minéraux 
d'un intérêt scientifique. 

Jugeant d'après les recherches faites et les renseignements 
procurés jusqu'à 1887. M. Bell regarde la région du N.-O. de 
la l>aie d'H. comme étant celle qui promet le plus de richesse 
en matériaux économiques que l'on puisse exploiter parmi les 
territoires inexplorés. 



Parmi les mammifères terrestres, les principaux sont : l'ours 
polaire-, les renards blan<^ yris, rouge et noir, le reime, le loup 
et le lièvre, le long du détroit et au nord de la baie. Parmi 
les oiseaux, les espèces les plus abondantes, sont les outaides, 
les cygnes, les canards et le ptarmigan ou perdrix blanche. 

La "faune" et la "flore" observées par F. F. Payne assistant 
dans le corps méti'orologique du Canada et alors en charge du 
poste d'observation à la baie Stupart, sur la côte N.-O. de la 
sonde sont décrites dans le ra{)port de 1886. Dans la partie 
qui regarde la "flore", il y a un tableau qui indique que les 
boutons des plantes se forment entre le 20 <fife mai et le 27 de 



— 14 — 

juin, et les feuilles dans le cours de juin ; les fleurs s'épanouis- 
:4ent en juillet, les graines mûrissent en août et les plantes 
dépérissent à partir du 20 août au 15 sept. 

D'après les renseignements obtenus on trouve l'épinette 
blanche et rouge, le sapin, le bouleau, le tre'uble et le peuplier 
dans l'intérieur de la région du Labrador, vers le nord, mais à 
quelque distance de la côte de l'Atlantique et du détroit d'H., 
excepté le long des rivières et des ruisseaux où croissent ordi- 
nairement l'épinette rouge et blanche. Sur le côté O. de la 
baie d'H,, on voit de l'épinette tout le long de la côte, en 
grandes quantités. 



Sur la côte du Labrador, le long de l'Atlantique, les indigè- 
nes se groupent d'ordinaire autour des Missions Moraves dont 
la principale est à Nain, où il sont au nombre d'environ 200 ; 
cette mission est située à 410 milles au X, de Belle-Ile et à 
o50 au S. du Cap Chudleigh à l'embouchure E. du détroit 
d'H. Dans le reste du Labrador sous la juridiction de Terre- 
neuve, il y en a 400, ou un peu plus, suivant le recensement 
de 1884. Le nombre total des habitants alors était de 4,2.12 
dont 607 Esquimaux. 

Le long du détroit d'H. on estime que le nombre des Esqui- 
maux n'excède pas 1500. 

Les hommes ont ordinairement une hauteur de 5 2 à 5 8 

> )> » >» 
et les femmes de 4 10 à 5 1^. Leurs familles comptent ordi- 
nairement 2 enfants. Leurs principales maladies sont celles 
des poumons. 

Suivant le recensement ecclésiastique de 1881, la population 
des divers postes de traite et de pêche le long de la côt'^ nord 
du golfe St-Laurent, de Tadoussac à Blanc Sablon, distance 
d'environ 676 milles, était de 8,457 personnes dont 3,500 
entre Tadoussac^t Betshiamitz sur les premiers 77 milles. La 
population sur le reste du parcours en y comprenant celle de 



— 15 — 
Betbhiamitz était de 4957, dont 1228 sauvages. 



Suivant le relèvement du lieut. Gordon de 1886 le havre 
Churchill de 1000 x 1500 verges d'étendue avec une profon- 
deur de plus de 4 brasses à marée bisse, est éminemment sûr. 
Sa situation pour un terminus de chemin de fer est admirable. 
Les quais pourraient être construits et le bassin d'eau profonde 
agrandi à peu de frais. On pourra se procurer toute la pierre 
requise pour le lestage des quais et des jetées, sur la grève. La 
nature semble avoir déjà fourni ce qui est le plus essentiel 
pour établir, en cet endroit, un port de commerce sur une 
vaste échelle. La glace se forme dans le havre vers le milieu 
de novembre et se débâcle vers le milieu de juin. Les marées 
y sont de 8 à 15| pieds. 

Gordon dit que le port Nelson est des plus difficiles et dan- 
gereux et que quelque somme qu'on y dépense on ne réussira 
pas à y mettre les vaisseaux en sûreté ; d'ailleurs la brume y 
prédomine en juillet et août. 



La factorerie de York, sur la langue de terre entre les 
rivières Nelson et Hayes, toujours du côté ouest de la B. d'H. 
Depuis plus de 2 siècles de 2 à 5 voiliers, en moyenne, fré- 
quemment escortés par des vais'^eaux de guerre, sont partis 
d'Europe et d'Amérique à destination de Fort Nelson ou 
autres parties de la baie d'Hudson et sont revenus pendant la* 
même saison, avec des cargaisons par la seule voie praticable 
du détroit d'H. 

Le port York se trouve à l'embouchure d'an fleuve qui 
décharge un volume d'eau double de ceux des bras N. et S. 
réunis de la Saskatchewan et qui se jette dans la mer, par une 
dépression étroite des Laurentidv^'s dont la chute est de quel- 
ques 700 pds, sur un parcours d'un peu plus de 400 milles, h 



— i6_ 

partir du point où il débouche du lac Winnipeg, Il est presque 
à la même distance que l'est Québec de Toronto, de la lisière 
d'une vaste légion fertile, au nord-ouest dont la superficie dé- 
passe 200 millions d'acres. Les dates de l'ouverture de la navi- 
gation sur la rivière Hayes varient du 9 mai au ler juin et 
celles de la clôture du 3 novembre au 9 d 'c. 



^. s chemins de fer à la baie d'Hudson : Chemin de fer sub- 
ventionné : de Winnipeg à un point situé au Port Nelson, ou 
dans les environs sur la baie d'Hudson, d'une longueur totale de 
650 mille — subvention en terres 6,880,000 acres, voir acte du 
49 Vict, Chap. 7o, 1886 et aussi l'ordre en conseil du 11 mai 
1885. Le chemin de fer devait être complété avant le 11 mai 

1890. ;■;; v:^^^: ;:>:*>*- 

Chemin de fer projeté du lac Nipissingue à la baie d'Hudson : 
1ère Sfctiou Xorth Bay près de i'extréuiité est du lac Nijùssin- 
gue, 20 milles à l'ouest de la station de Callonder sur le C. P. 
R , au lac Témiscamingue 81 milles — 2ème section du lac 
Témiscamingue au lac Abittibi 9-1 milles — oème section lac 
Abittibi à Moose Factory, baie d'Hudson 175 milles — total de 
;{50 milles. Une compagnie pour la construction de ce che- 
min de fer a été incorporée eu 1884 par l'acte 47 Vict , chap. 
30 — Cet acte a été amendé par l'acte 40 Vict, chap. 77. 1886 
accordant un délai pour l'époque de l'achèvement. Les tra- 
vaux devaient être commencés le 2 juin 1888, la première 
section achevée en 1890, la 2ème en 1892 et la 3ème en 1894, 
Le lac St-Jean est à 350 milles ou à la même distance du 
}»oste de la baie d'IL près de l'embouchure de la rivière Ru- 
pert sur la baie d'H., à l'est et au sud de la baie James que le 
lac Témiscamingue se trouve à partir de "Moose Factory" qui 
est situé sur le côté Ouest près de l'extrémité de la même baie. 
Une ligne droite entre le lac St-Jean et la baie d'Hudson 
passerait à environ 60 milles au sud-ouest du grand lac Mis- 
îassini qui se décharge dans la rivière Rupert dont le volume 



— 17 — 

fst aussi grand si non plus grand que celui de la rivière 
■Saguenay. 



Nous venons de voir à grands traits, l'étendue de la baie 
d'Hudson, ses ressources, son climat, la difficulté d'y parvenir 
par eau par le détroit de même nom, les projets déjà en voie 
de réalisation de deux chemins de fer pour y arriver : l'un de 
f>50 milles de Winnipeg au Port Nelson, l'autre de 350 milles 
i)artaiit de North Bay sur la rivière Ottawa au nord du lac 
Nipissingue pour se rendre an lac Témiscamingue, de là au lac 
Abittibi et de la à Moo^e Factory sur la baie James à l'extré- 
mité sud de la baie d'Hudson, — ces deux chemins sont déjà 
depuis plusieurs années indiqués sur la carte du Canada — et 
'Québec le plus intéressé de tous à la confection d'un chemin 
])0ur s'y rendre n'a encore rien fait ; sauf il est vrai que le 
chemin qui relie maintenant Québec au lac St-Jeau est bien 
dans la direction voulue. 

La distance en ligne droite est de'350 milles, avons-nous dit, 
et quoique le lac Mistassini s'éloigne de 20 lieues de cette der- 
nière., la voie par Mistassini et la rivière Rupert ne sera guère 
que de 30 milles de plus ou de quelques 383 milles en tout, et 
il serait prob blement avantageux d'adopter ce dernier trajet 
])Our profiter chemin faisant des ressources économiques du 
Mistassini qui est un lac de 100 milles d'étendue, sinon davan- 
tage, et de celles des eaux de la rivière liupert qui relie le lac 
;i la baie James et que l'on dit être très poissonneuse. 

On a déjà prêté à M. Beeraer notre vaillant entrepreneur de 
chemins de fer et qui vient de mènera bonne fin celui du lac 
►St-Jean, celui de C'harlevoix et va compléter bientôt celui 
du lac St-Jeau à Chicoutimi, le projet de mettre à l'étude ce 
ihemin de la baie James. Venons lui en aide, si c'est le cas, 
et que la Province de Québec plus intéressée en ce sens que ne 
peut l'être le Gouvt. Fédéral qui sans doute nous fera néces- 
sairement un octroi, comme il en a fait aux chemins déjà men- 



— i8 — 

tionnés de Winnipeg et du lac Népissingue ; que le Gouvt. de 
Québec, dis-je, mettre la main à la roue dans les intérêts non- 
seulement de Québec mais de la province tout entière à la 
quelle les moj'ens coi-nnencent à manquer de pourvoir à ses 
besoins, de trouver un débouché pour ses produits, de l'ouvrage 
pour les désœuvrés. 



Allons-nous donc plus longtemps nous laisser manger 
l'herbe sous les pieds par les habitants des Etats-Unis qui nou^ 
passent devant pour exploiter les ressouces d'une mer inté- 
rieure située sur le sol même du Canada et qui est pour le 
moins autant du ressort de la Province de Québec que de celle 
d'Ontario puisque la ligne de division entre les deux provin- 
ces bifurque la baie, et dont l'exploitation devrait être acquise 
plutôt à Québec qu'à Ontario qui est de beaucoup plus riche 
que Québec sous tous les rapports et n'a pas besoin de cette 
source additionnelle de profits pendant que Québec en a le 
plus grand b^soin. 

Le premier pas à faire serait pour le Gouvernement Local 
par l'intermédiaire du Fédéral de mettre fin de suite à l'exfMoi- 
tation des [lêcberies et autres ressources de la Baie d'Hudson 
par nos voisins les Américains qui ne payent pas et n'ont 
jamais payé un seul sou au Canada depuis près de 50 ans 
qu'ils naviguent, sans aucun droit, dans nos eaux. 

Qu'on se rappelle qu'il y a quelques années la pêche à ht 
baleine était une industrie importante dans le golfe St- Laurent 
où pas moins de dix vaisseaux y étaient engagés, mais que 
après que droit fut acquis aux Américains de pêcher dans ces 
eaux, ils ont eu très peu de temps complètement détruit cette 
pêche en chassant du golfe le poisson par les moyens mêmes 
employés par eux pour le capturer ; bombes explosibles et 
autres méthodes inavouables. 

Le lient Gordon dit : "Malgré que cette industrie (la pêche 
de la baleine dans la baie d'Hudson j est «ncore comparative- 



— 19 — 

ment peu importante, je suis persuadé, que vu les profits con- 
sidérables qu'ont réalisés ceux qui y sont engagés, les facilités 
pour sont extension, et l'attention toujours croissante que l'on 
comtiience maintenant à douter aux ressources de la région de 
la baie d'Hudson, il n'y a ?..icun doute qu'un plus grand nom- 
bre de vaisseaux y sera attiré avant peu. Je suis certain, 
continue-til, qu'il y a dans ces eaux des baleines en t'es 
grand nombre, par le fait qu'on les a constamment rencon- 
trées pendant les courses du Neptune dans la baie, et parceque 
autant que je puis le savoir, jamais un de ceux engagés dans la 
capture n'a eu à s'en retourner sans avoir une bonne cargaison, 
La barque "George et Marie" Capt. Fisher, du Cunnecticut. 
hiverna à l'Ile de Marbre durant la dernière saison, sortit de la 
glace le 7 juin dernier et réussit à prendre trois baleines dans 
la baie d'Hudsou même avant de se rendre au "Welcome" ; et 
si l'on considère que o à 6 de ces mammifères compléteraient sa 
cargaison, il est facile de voir que cette pêche est loin d'être sur 
le déclin. Pour la Cie de la B, d'H. c'est la pêche au mar- 
souin qui est la plus étendue. Le lard (blubberj de ces mam- 
mifères pèse de 250 à 400 Ibs et produit eu abondance la plus 
belle huile. 



Gordon remarque encore et recommande que dans tout 
traité de réciprocité qu'on pourrait fair^ avec les Etats-Unis, 
une allouance devait être faite pour la grande valeur des pê- 
cheries de la Baie d'Hudson. 

Si, dit-il, l'on doit permettre aux baleiniers américains de 
continuer à pécher dans ces eaux, des arrangements devraient 
être faits par lesquels le Canada recevrait un équivalent subs- 
tantiel pour le prévilège. Je suggérerais, continue-t il, qu'à 
moins d'une large compensation pour le privilège, le Gouvt. 
Canadien devrait réserver le droit de décréter et mettre en vi- 
gueur des règlements capables d'empêcher la destruction de ces 
précieux mammifères et leur disparition de nos eaux arctiques. 



— 20 



Voici ce que dit l'Hble. M. Nantel ministre des Tr.-?. de la 
Pr. de Q. dans son rapport pour 1892. Voir page V, du dit E. 

Le chemin de fer Montrerai et Occidental sera construit l'an 
prochain jusqu'à la chute aux Iroquois, c-à-d. jusqu'au centre 
des diverses paroisses nouvelles fondées par le ct.ré Labelle. 
La compagnie se propose de pousser ses travaux jusqu'au lac 
N'oniiningue et de la jusqu'au lac Témiscamingue, oîi elle ferait 
jonction avec le chemin de fer de colonisation du lac Témisca- 
mingue, dont les travaux seront terminé l'an prochain, d'après 
l'information que le département en a reçue des autorités du 
Pacifique Canadien. Si ce projet se réalise, le côté Nord de la 
vallée de l'Outaouais sera traversé par une voie ferrée dans sa 
partie la plus riche, si on l'étudié sous le triple rapport des 
raines, des forêts et de l'agriculture. 



11 y a à dire quelques mots, maintenant, de la baie James 
plus spécialement dont ne parle point le lieu. Gordon, les étu- 
des de ce dernier se rapportant surtout au détroit d'Huilson et 
à la possibilité d'écouler par cette voie d'eau les ressources de 
la baie d'Hudson. Cette information nous est acquise dans le 
rapport de M. l'arpenteur Ogilvie du 20 janvier 1891, à l'Iible 
Ministre de l'Intérieur à Ottawa, par le quel M. Ogilvie avait 
été chargé d'explorer la route par les lacs Témiscamingue et 
Abittibi et par la rivière Abittibi. 

M. Ogilvie après quelques pages de son rapport données aux 
observations astronomiques nécessaires pour établir les latitude* 
et longitudes des points importants du parcours, fait le récit de 
son voyage à partir Matawan sur la rivière Ottawa jusqu'au 
lac Témiscamingue partie par eau et partie par cheuiin de fer 
de la Cie de Colonisation du lac de ce nom ; c-à-d. que les por- 
tages sur ce parcours Je 35 milles sont remplacés par de.s 
sections de voie ferrée dont la première, à 4 milles de Mata- 
wan, est de I mille de long : le second, à environ 8| milles de 
Matawan, aussi par unt section de chemin de fer d'un demi 



21 



mille de longueur ; le troisième, à environ 12 milles de Matii- 
wan, d'une longueur d'un quart de mille. La dernière section 
de 'oie f-rrëe de six milles de parcours se trouve entre la tête 
du lac "sept ligues" qui n'est qu'une expansion de la rivière 
Ottawa et le pied du lac Témiscaniitigue, sur le quel lac il y a 
déjà, paraît il, une demi douzaine de bateaux à vapeur. 

M. Ogilvie nous conduit ensuite de lac en lac, de portage eu 
portage, de rivière en rivière jus.ju'au lac Abittibi, puis par la 
lac Abittibi et la rivière de ce nom jusqu'à Moose Kiver 
(rivière au caribou) et enfin à la baie James, avec récit cir- 
constancié des distances, des rapides, des chûtes, des ressources 
économiques du parcours : minéraux, faune, flore et poisson. 



La Baie James qui fait partie, la partie la plus au sud, la 
plus voisine de nous, de la B. d'Hudson, mesure 160 railles de 
largeur d'E. à O. sur une profondeur de 260 milles du sud au 
nord où l'on tombe dans la B. d'H. proprement dite. Elle est 
donc d'une superficie de plus de 40,000 milles carrés ou de 
2660 fois aussi grande que le havre de Québec. Il y a dans 
cette baie quelques iles dout la plus grande Agooniska mesure 
près de 70 milles de longueur. La distance de Moose Factory, 
où doit aboutir le chemin de fer de Matawa, Témiscamingue et 
Abittibi est à 120 de llupert house où la Cie a encore uir 
poste comme elle en a un à Eastmaiu à 60 milles plus au nord 
sur le côté est de la Baie. J. Kupert house est située sur la 
rivière Rupert, décharge du lac Mistassini et c'e^t de là que se 
distribuent tous les agrès nécessaires aux autres postes de la 
Cie. autour de la baie James. 

Entre les postes Mccse et Rupert et jusqu'à Ea=tmain. 
le littoral de la baie est plus élevé et presque à un même ni- 
veau, le sol êableux pins ou moins et le bois d^^ moyenne fu- 
taie excepté dans le voisinage des rivières où il devient de 
plus grande taille. Une des rares côtcjs autour de la bai'^ dite 



4 



— 22 — 



Slicnicks jVlount s'élève à la hauteur de GflO pieds, c'est la 
j)lus ôlevée des enviions ; plus à l'intérieur il y en a d'autres 
mais de moindre altitude. 

Aux postes Moose et Kupert dit Ogilvie comme aux autres 
}K(.stes qtie J'ai visités, la Oie a des jardins où elle récolte tonUs 
les patates dont elle à besoin. D'autre^ légumes y sont cultivés 
en (juantités assez considérables, mais les melons, tomates, 
concombres n'y mûrissent point, la saison des chaleurs n'y 
étant pas assez longue, et d'ailleurs à QuébL'C même il y a des 
annt'es où les tomates et le tabac ne peuvent le faire non plus, 
lorsque les gelées d'automne nous arrivent trop tôt. 

Le raisin de Corinthe ( eu; 'ants, vulgairement appelé gadel- 
les dans nos campagnes ) rouge et noir y réussit aux deux 
endroits et est bon de grosseur et de qualité ; et l'on trouve 
les fraises et framboises sauvages et groseilles tout le long de 
la côte et jusqu'à East Main si non plus loin. Mais ces fruits 
y mûrissent plus tard qu'à Ontario, ou vers la fin d'août, les 
'^'roseilles une semaine ou deux plus tard. Les bluets se trou- 
vent en quantité tout le long de la côte et comme l'on sait 
c'est un fruit précieux, nourissant et qui se conserve bien et 
fort longtemps à une assez basse température. 

A tous les postes autour de la baie se trouvent des bêtes à 
cornes en nombre considérable, de forte stature et d'une ap- 
parence qui ne le cède en rien aux animaux d'ici. A East 
Main on fait l'élevage des bestiaux et moutons pour de là les 
distribuer aux autres postes autour de la baie, soit comme 
bœuf et moutoa ou comme vaches laitières. Ces dernières 
n'ont pour pâturage qu'une herbe grossière, un foin que l'on 
récolte sur des bas fonds submergés à haute marée. Le foin 
se coupe entre marées, on le charge à bord de chaloupes qui 
tiennent de 5 à 6 tonnes chacune pour le transporter à desti- 
nation où on le met en meule après l'avoir faitsécher au soleil 
comme on le fait ici. Les praiiies de Kupert House sont a 
quelques 4 milles du poste ; on y emmagasine le foin sur des 
planchers érigés à une hauteur convenable pour que la marée 
haute ne les atteigne point et il y a autour de la baie de nom- 



— 23 — 

itreiises prairies <iue l'on peut utiliser de la raêir.e manière. 

Lefi ressources forestières de la baie James ne sout point de 
nature à prêter à un commerce bien lucratif. Le bois y est 
d'ordinaire de petit diamètre .sauf sur les rivières où il y a des 
l'pinettes d'une quinzaine de pouces de diamètre, du pin, du 
sapin, du bouleau ; mais pour tous les besoins de constructions 
ordinaires : maisons, granges, etc., il y a en ciuantité les gros- 
seurs requises et les sites à moulins pour le scier ne manquent 
point sur ies rivières qui se déchargent dp.ns la baie. Il ne 
manque point non plus de bois de chaufiage pour de longues 
unnées à venir. 

11 ne parait point y avoir dans le voisinage du poste liupert 
iiutre chost d'une valeur économique qu'un granit louge-gi'is 
do très belle qualité qui s'y trouve en lits massifs offrant toute 
la pierre à bâtir qui puisse y être requise >.i dont on peut 
extraire des blocs de toutes dimensions voulues. Ce rocher est 
c <nnu sous le nom de " lied Rock " et se trouve à l'est de la 
baie h mi chemin entre les postes Rupert et East Main, On 
dit ce granit très beau et approprié à faire des monunjcnts et à 
•les fins d'ornementation. 

On pourrait dire que les seules ressources du district autour 
de la baie consistent en ses pelleteries de ciistor, marte, loutre, 
renard, vison, lynx, ours noir, loup et ours blanc. Le menu 
fretin ou petit poisson de la baie consiste en petit poisson 
Itlanc, truite, brochet, etc. Le gros poisson est le marsouin blanc 
ilont l'éclat fait superbe contraste avec les eaux noires de la 
baie, et comme il a de 12 à 18 pieds et plus de longueur on le 
voit très loin quand il vient à la surface pour souffler. 

En fin de compte il ne parait point que les pêcheries de la 
baie James puissent à elles seules motiver de grands frais pour 
les exploiter ; mais il eu est autrement de celles de la baie 
d'Hudson proprement dite comme je l'ai déjà fait vr ir, et si 
c'est le cas, leur écoulement par chemin de fer, voie de terre 
jusqu'à Québec et de là chez nous et à l'étranger serait évidem- 
ment plus prompt, plus f-icile, plus expéditif et par conséquent 
plus lucratif que far la voie d'eau du détroit d'Hudson, puisque 



— 24 — 

un baleinier ne peut faire son voyage, sa pêche, sa cargaison 
qu'une fois tous les deux ans, tandisque par la route jtrojetét' 
du lac St-Jean, Mistassini et Rupert, clia<iiie vaisseau engagé 
dans la pêche des cétacés ferait au moins deux cargaisons par 
saison, peut être trois, quiutuplant ainsi du coup les profits de 
l'entreprise. 

Les vaisseaux requis, construits ici comme par le passé, se 
rendraient avec leurs équipages à la b.iie d'Hudson par le 
détroit de même nom ; mais au lieu d'avoir à en risquer tous 
les ans les périls pour y aller et en revenir, mouilleraient ou se 
mettraient en hivernement dans la baie James, où leurs équi- 
pages se bâtiraient, logeraient leurs familles qui, avec les bes- 
tiaux, porcs, vaches et moutons qu'elles y élèveraient, les patates 
et autres légumes, fruits, etc. qu'elles y cultiveraient et l'abon- 
dance de gibier, canards et oies sauvages qu'elles y tueraient au 
printemps et mettraient en salaison, y passeraient utilement 
et agréablement leur temps. 

Pêche à la baleine 

L'Angleterre de 1860 k 1886, période dti 27 ans et raalun- 
le petit nombre de vaisseaux engagés dans cette industrie a 
fait £1,634,624 stg.= $8,173,120.00 ou une moyenne de 
$302,710.00 par année. Le nombre de baleines prises sur les 
côtes du Greenland n'a été que de 8 par année en moyenne 
mais de 82 dans le détroit de Davis, total de 2478 baleines en 
27 ans, valeur moyenne de $3,330.00 par baleine. 

Le baleinier anglais est d'orninaire de 400 à 500 tonneaux. 
Ou le blinde à l'extérieur à la ligne de flottaison, et pour pré- 
venir les effets tranchants des glaces, d'une armure en bois 
d'Australie d'une grande dureté, appelé " iron bark " écorce de 
fer. 

Sous le plancher de bas de la cale se trouvent placés quel- 
ques 50 réservoirs en fer pouvant contenir chacun 25 barils 
d'huile, ensemble de 200 à 250 tonnes. 

Chaque baleinier a huit chaloupes et de ij^O à 60 hommes 



— 25 — 

composent l'équipage. Ses dépenses mensuelles en mer sont 
de l500 ou de 82,500 par mois. 

Le baleinier coûte au complet £17,500.00 ou $87,500.00. 
Il a un engin auxiliaire de 75 chevaux-vapeurs. 

La chaloupe baleinière a 27 pieds de longueur, 6 de large. 
2| de profondeur. Chaque chaloupe à de 600 à 800 brasses 
de cordes de | de pouce de grosseur ou diamètre ou de 2f de 
cire. Sur le devant de la chaloupe est un petit pont ou ponceau 
où est installé un canon poui seivir à lancer au besoin le 
harpon. Cet instrument est monté sur un pivot pour pouvoir 
se diriger dans un sens quelcoiique. 



Lorsque du " nid de la corneille " le " crow's nest " ainsi 
appelé et (|ui n'est autre chose qu'un baril qu'on attache au 
haut d'un mat, on aperçoit une baleine, une des chaloupes part 
de suite à sa poursuite en ayant soin de ne pas se hasarder 
dans le rayon visuel de la baleine. A 25 pieds si c'est à la 
main, à 75 pieds si c'est au canon, on lui décoche le harpon 
qui lui pénètre les flmcs, et birbelé qu'il est comme une Hèche, 
ne peut ensuite s'en détacher. A la tige du harpon qui est en 
fer de I pouce et de quelques 6 pieds de longueur est attaché 
avant de h; décocher l'extrémité libre de la corde enroulée, à 
l't fiet voulu, sur un fuseau pour en permettre le débit à de- 
mande. 

La baleine dès qu'elle se sent atteinte, part comme une 
flèche, elle se dirige en descendant vers le fond de la mer où, 
si le fond n'est éloigné que de 400 à 500 brasses, elle va assez 
souvent, avec sa vitesse acquise, se heurter, se briser la mâ- 
choire. Au bout de 30 à 40 minutes, force lui est de revenir 
à la surface pour respirer ou souffler comme on dit. 

Dans l'intervalle d'autres chaloupes se sont mises de la 
partie et lorsqu'elle reparait à la surface lui lancent des 
harpons Elle part une seconde fois, mais avec moins de 
vitesse, elle a perdu de son sang, elle s'aftaiblit, elle s'éloigne 



— 26 — 

moins et revenant une troisième fois à la surface, son mouve- 
ment plus lent permet aux chaloupes de s'en approcher de 
plus près et de lui viser les poumons, la région, du cœur. 

Alors on la tue, on l'amène le long du flanc du vaisseau ; 
on l'y attache en lui passant plusieurs cordes qui du pont du 
vaisseau lui font le tour du corps et remontent aux bastingages 
pour y passer dans des rias qui en permettent la manœuvre. 

On se met ensuite à dépecer le monstre qui de 50 à 60 pieds 
de longueur qu'il atteint, a les flancs garnis d'un à deux pieds 
d'épaisseur de lard qu'on lui enlève par bardons chacun de 
1000 à 2000 livres, pour les haler sur le pont, les réduire en 
morceaux d'un pied à peu près, les consigner aux réservoirs de 
la cale du vaisseau dont on a déjà parlé. A mesure qu'on 
fait à la mamraale une rainure le long du corps, sorte de fossé 
ou d'excavation longitudinale, on la tourne peu à peu sur elle 
même au moyen des cordes que je vous ai dites, on lui enlève 
de nouveaux filets ou bardons de lard et justiu'à ce qu'enfin 
on i'f n ait complètement dépouillée. Puis viennent les fanons 
dont il y a autant de quintaux que de to.nneaux pesant d'huile, 
et dont la valeur e.st au moins égale à celle de l'huile, quelque 
fois beaucoup davantage. 

C'est une pèche quelque fois dangereuse et toujours émou- 
vante que celle de la baleine : la pèche du saumon en donne 
une idée en miniature puisque comme la baleine, le saumon du 
moment qu'il se sent pincé, s'élance, revient, repart et que ce 
n'est qu'au bout d'une demi-heure qu'il s'est assez affaibli pour 
pour que l'on puisse et souvent avec peine, avec effort le cap- 
turer. Prendre la baleine est affaire d'une heure à une heure 
et demie et il faut être sur le qui- vive et savoir en approcher ; 
car, plus d'une fois, avec la force qu'on lui connaît, elle a mis 
en pièces d'un coup de sa queue la chaloupe qui la pouisuivait, 
et avec perte de vies ou au grand risque de l'équipage. Sa 
vitesse est énorme, elle atteint dit on jusqu'à 50 milles à 
l'heure, deux fois celle d'un vapeur océanique, elle tiendrait 
tête à une locomotive lancée sur la voie avec un mouvement 
de progression de près d'un raille à la minute ; aussi faut-il 



— 27 — 

que la corde attachée au harpon puisse se dérouler sans encom- 
bre, puisque le moindre arrêt, le moindre obstacle au dévidage 
du fuseau ferait casser la corde et perdre la baleine, ou entrai- 
ner et sombrer la chaloupe et ré(iuipage. 



Dans les 27 ans dont je vous ai parlé ^ je prends ces 
chiffres dans la dernière édition de l'Encyclopédie britannique 

— l'huile à varié £1.18 £2.10 ou de $5.25 à $12.00 le quintal 

— 5 à 11 cts la livre ou 50 à 110 le gallon. Les fanons ont 
varié de £18 à £110 ou de $90.00 à $550.00 soit de 80 cts à 
$4.91 la livre et sont devenus aujourd'hui si précieux qu'on 
ne s'en sert plus, comme par le passé pour les parapluies et 1 s 
corsets où on les reninlace par des lames d'acier, réservant la 
baleine pour le polissage de la soie et autres fins. 

Vous pouvez voir de ces fanons, mâchoires de baleiue, au 
musée de l'Université Laval où elles sont de taille à y laisser 
passer un carosse, voiture à deux chevaux, et elles atteignent 
quelquefois les dimensions sinon des portes, au moins des 
poternes de la porte St-Jean. Ces fanons, lames cornées que 
la baleine a dans la bouche et qui lui servent à retenir les 
petits poissons dont elle se nourrit, se composent quelquefois 
de plus de 500 lames, à fibres parallèles dont on fait un très 
grand usage dans le commerce, pour la manufacture des 
bros>es, des balais, etc. 

Lors de l'introduction de la baleine en 1708 on la payait 
£700 la tonne — $8,500.00. Durant ce siècle le prix en a 
varié de £350 à £500 le tonneau, mais au 19ème siècle elle est 
descendue à £25. l'ius tard ell'^ est remontée à £200 et £300 
mais avec la diminution dans la pêche du cétacé qui la fournit, 
on paye aujourd'hui jusqu'à £1,500 — $7,500.00 la tonne et 
davantage pour la baleine du Groenland. 

Il y a trois sortes de baleines : celle que l'on obtient du 
cétacé de même nom que l'on capture sur les côtes du Groen- 
land, dite baleine franche, balaena mysticetus, la plus estimée ; 



— 2S — 

celle des mers du Sud, produit de la baleine noire, bilaena a'i.s- 
trali.s ; celle enfin de la baleine du Pacifi'i'ie, l)alaeua j ij)onica 
(du Japon ). Les lames des fanons pour les préparer ]>our le 
cornmeice sont bouillie.s pendant quehjues 12 heures jusvjii'à ce 
que la substance soit devenue toit à fait amollie et c'e-t laiis 
cet état qu'on la sépare en tiges ou rubans de la larg(Mir, de 
l'épaisseur voulues et même eu filons ou filaments de la ténuité 
d'un cheveu suivit les usages que l'on veut en faire. 



Le chacalot est le cétacé, la baleine, qui donne l'hiile dite 
sperraaceti. On le chasse toute l'année dins les mers tropi- 
cales. Avant la guerre d'intlépentlance Jes Etats-Unis ou en 
1774, une flotte de pas moins de 370 vaisseaux poursuivait 
cette pêche, et en 18 -t6 pas moins de 735 vaisseaux avec un 
tonnage de 233,199 tonneaux — moyenne par navire d« 315 
tonnes — y étaient engagés 

La tête du chacalot (jui est un odontoceti — c-à-d, qui a des 
dents — a une longueur de quelques 14 à 20 pieds ou du tiers du 
corps du cétacé, est très haute et de massive structure troiquée 
en avant, et doit cette grosseur immense et forme remarquable 
surtout à une accmnulation d'un tissu singulièrement nio lifié 
de matière grasse qui remplit la grande cavité sur la surface 
supérieuie du crâne. L'huile contenue dans les cellules de 
cette énorme cavité, aprè.s !e raffinage qu'on en fait en le faisant 
bouillir, produit ce que l'on ai)pelle le blanc de baleine, et 
l'épaisse fourrure de lard qui couvre de toutes parts le corps 
du poisson, ou de la mammale plutôt, car les baleines, les mar- 
souins, les dauphins ne sont point des poissrns, mais des êtres 
vivipores ou dont les petits viennent au jour comme ceux des 
autres mammifères ; l'épaisse couche, dis je de lard ou de 
panne (blubber en anglais) qui enveloppe de toutes parts le 
monstre marin donne la précieuse huile que l'on connait et qui 
valait en 1882 £55 ou $275 00 la tonne — 12 cis. la livre ou 
$1.20 le gallon. 



La mâchoire inférieure de ce cétacé a de chaque côté, de 20 
H 25 grosses dents de forme conique qui fournissent de l'ivoire 
de bonne qualité. L'ambre gris, substance ainsi appelée, autre- 
fois employée dans la médecine et maintenant dans la parfu- 
merie, est une concrétion formée dans l'intestin de cette baleine 
*^t que l'on trouve flottant à la surface des mers qu'elle habite. 
On en reconnaît l'origine et la pureté, c-à-<l. que l'on sait que 
c'en est par la présence des mandibules cornées des céphalo- 
podes dont se nourrit la baleine. 



Le baleinier américain est, comme je l'ai dit, de quelque 300 
tonnes de jaugeage seulement et son équipage n'est que de 30 
hommes en moyenne et en cela, comme l'on voit, de moitié plus 
économique que le baleinier anglais avec ses 400 à 500 tonnes 
et son équipage de 40 à 50 mains. 

Mais il y a encoie à parler du baleinier norvégien, le plus 
économique de tous. Le trait saillant de la pêche à la baleine 
<iue fait le norvégien est Fusage du harpon explosif qui tue 
l'animal, en le fiappant, pour ainsi dire. Le harpon qui pèse 
123 livres et est chargé d'une cartouche contenant f d'une livre 
<le poudre, est lancé par un canon de 4J pouces de diam. à la 
bouche iivec calibre de 3 pouces, pesant 15 quintaux et dont la 
charge est d'une livre de poudre. 

Le vaisseau servant de chaloupe baleinière est un vapeur de 
quelques 80 tonneaux et de la force de 30 chevaux- vapeur. Ce 
vaisseau sert non seulement à porter le canon et à poursuivre 
et capturer la baleine, mais aussi à la remorquer à terre- où l'on 
en utilise non seulement l'huile et les fanons mais aussi la 
chair, les os pour en faire de l'engrais et ne rien perdre. En 
1885, les Noivégiens tuèrent 1300 baleines et en 1886 plus de 
1700 et cela avec une flotte de seulement une trentaine de 
vaisseaux ou de 43 à 56 baleines par saison pour chaque vais- 
.«eau ; et ce que fait le Norvégien chez lui le Canadien peut le 
faire à la Baie d'Hudsou. 



— 30 — 

Toutes ces données ne sont point pour rien, maïs pour en 
venir à établir sur une base certaine et à laquelle ou puisse se 
fier, les profits d'un baleinier, d'une baleinière si vous voulez^ 
enfin de la pêche à la baleine ; car pour démontrer l'utilit*», la 
nécessité d'un chemin de fer à la baie d'Hudson, il faut établir 
non seulement qu'il y a des profits à y faire, mais des profits 
assez grands, assez considérables pour payer en même temps le 
coût annuel de cette industrie, c-à d. l'intérêt sur le capital à y 
afîecter, les frais de gestion, l'intéiêt sur le coût de construire 
le chemin, de le faiie fonctionner, et laisser encore un dividende 
suffisant sur le capital pour que ça vaille la peine de se lancer 
dans une semblable entreprise. Gordon a évalué à pas moins de 
$18,000.00 aux prix actuels de l'huile et des fanons etc., les 
matières économiques à tirer d'une baleine de 50 à 60 pieds ; 
mais tenons-nous en jour pire du l'on côté à l'évaluation basée 
sur une moyenne de 25 ans de §47,000.00 par vaisseau par 
année. 

Or ces vaisseaux de la Nouvelle Angleterre qui depuis 40 
ans fréquentent les eaux de la baie d'Hudson, partent en juillet 
de New Bedford et de New London Etats du Massachussets et 
du Conneeticut pour hiverner, comme je l'ai déjà dit, à l'île de 
Marbre au fond de la baie, faire leur pèche le printemps suivant 
et n'être de retour qu'à l'ouverture de l'année suivante. 

Voilà donc qu'il leur faut 2 ans pour une seule cargaison, et 
étant donnés les retards et dangers d'une navigation arctique, 
aller et revenir à travers un détroit qui a au moins 500 milles 
en longueur, qui n'est ouvert que de 3 à 4 mois sur les 12 
mois de l'année, et même durant ces mois toujours obstrué 
par les glaces et glaciers, et où il faut procéder non à l'aiguille 
mais à la sonde ; je dis qu'étant donnés ces éléments retarda- 
teurs, il leur serait impossible de compléter leur voyage, leur 
cargaison, la même année. 



Je viens donc résoudre ce problème de quadrupler du cou[) 



— 31 — 

les profits sur une cargaison, et qui sont déjà très grands, eu 
quadruplant le nombre de voyages, le nomb^v. de cargaisons : 
voici comment — je l'ai déjà exquissé à grands traits — en cons- 
truisant ici, au Canada, à Québec surtout, à Halifax, etc. la 
flotte voulue de quelque 100 vaisseaux de 300 tonnes à 350 
tonnes, eu les équipant de tous les agrès 'nécessaires, chaloupes 
et instruments de pêche, réservoirs à huile etc. et en les ravi- 
taillant pour un an ou deux ou trois. Ces vaisseaux se ren- 
draient par le détroit d'Hudson à la baie de ce nom pour ne 
plus en revenir, pour y hiverner et y faire 4 pêches contre 
une, deux par années, car il est connu qu'il y a la pêch'' du 
printemps comme il y a la pêche d'automne. 

Mais ce serait une vie par trop ennuyeuse, une vie qui de- 
viendrait à la longue insupportable si le curé, le missionnaire et 
le clocher du village n'étaient point là, à la vue duquel on se 
retrempe. Et encore, rien que le curé et tout aimable qu'il 
soit ce n'est pas assez — vous l'avez deviné Mesdames, Dieu 
l'avait deviné du temps d'Adam, eh bien, oui, c'est vous qu'il 
faut, c'est la femme, c'est la famille, ce sont les petits pieds 
d'enfants battant le })arquet, leurs petites voix d'oiseaux enso- 
leillant le tout, c'est l'hiver passé au milieu des siens, c'est tout 
un village qu'il faut, le boucher, le boulanger, le cordonnier, le 
ferblantier et le reste, c'est le bureau de poste, la miiirie, le 
presbytère, l'école des filles, celle des garçons, plus tard peut 
être le collège, le couvent, un juge de paix-, un magistrat, le 
notaire, l'avocat, le médecin. 



Je vous ai déjà dit que la saison, la température de la baie 

James — sur le littoral du quel on bâtirait la ville, avec en 

face les bassins pour y mettre les vaisseaux en hivernement — 

n'est pas inférieure à celle de Riraouski, de Québec même, 

disons le. 

A l'appui de ceci, M. Scott, gérant du chemin de fer du Lac 

St-Jean, m'informe que le géologue Bell qui a passé toute une 



— 32 — 

Ionf,'ue saison dans la baie James lui a dit qu'il s'y était baigni!? 
dans la mer tous l-^s jours sans en excepter un seul, de juin à 
sejtenibre inclusivement et vous avez pu voir par les journaux 
d'OntHrio et le Montrent Gdzette du 28 février dernier qut lors 
des funérailles de l'évêque Horden, missionnaire au Moose- 
factory. et qui ont eu lieu en janvier dernier, *' le temps était 
cbaud et printanier." 

V'oici njaintenant des extraits d'une lettre du Révd Père 
Nedelec O. M. I., missionnaire indien. Il dit : 

1 — Le ])ays est en giaiéral habitable, .sauf quelques endroits 
de la côte de l'Est de la baie, mais de ce même côté la pêche 
est bonne. 

2 — A l'exception de quelques endroits épars du littoral de 
la baie, on y cultive toute espèce de giains, hors le blé et le 
sarrfisin ; de jtlu.'^ le.s légumes et les fruits y réussis.-ent 

o, — Je trouve ditlicile de dire quelle population pourrait 
soutenir ce territoiie. Il y a <le i'espace pour des millions avec 
une agriculture améliorée et le déveloj)p( ment dt- s iiid stries. 

4. — L'extrême chaleur est de 100 ^ et le maximum du 
fioid de 50 ° (comme au Manitoba). La température moyi-'une 
de janvier y est de 3" seulement (au-dessous de zéro je suppose). 

5. — En quelques en<lroits, le cliuiat est supérieur a celui 
du nord de l'Alleniague, de la l*ologue, de la Norvège, du nord 
de l'Ecosse, du Lae St-Jerni, de Terre-Neuve. Ci et la les res- 
sources naturelle? sout magnifi(|ues, ailleurs elles le sont moius. 
Comme règle générale, la baie ressemble à Québec et au district 
du lac St Jean. Tout ce que je puis diie, ajoute M Nedelec, 
c'est que le pays est plus vaste et plus habitable qu'on ne t-au- 
rait se le figurer. 

6. — Le sol est en général de nature argileuse, voir * Les 
relations des Jésuites " voyage du Lac St-Jean à la Baie 
d'Hudson — Proulx. Voir aussi les rapports de Bowen, magis- 
trat stipendiaire, des Iles Manitoulines, Ontario, favorables. 

7. — Entre le lac Témiscamingue et la hauteur des terre.s, 
pin bîan? et rouge, l'épinette et le bouleau abondent ; du côté 
opposé, l'épinette, le bouleau, le cèdre. 



— 33 — 

8. — Voir rapport du Dr Bell, géolog'je, quant aux miné- 
raux. 

9. — Les animaux à fourrure, les oiseaux et les poissons en 
• [uantité : aussi la baleine, voir le rapport du lient. Gordon de 
1885-6-7. 

10. — L'épaisseur de neige qui y tombe n'est pas excessive. 
Telle est la liaie d'Hudson dit le missionnaire, et il termine 

en ajoutant : Qu'était le Canada il y a 200 ans ? Qu'ét&ient 
les Etats-Unis ? Dans mon opinion, ce serait une bonne chose 
que la Province de Québec prit possession de cette partie de la 
Baie d'Hudson qui lui appartient. On devrait y inst lier des 
établissements d'Acadiens. Ce sont des gens vraiment faits au 
pays et quand les ressources du pays seront développées, et 
qu'on eu aura les moyens, l'on devrait y envoyer de Québec un 
bateau à vapeur pour explorer et développer davantage le pays, 
en attendant le chemin de fer par la vallée du St- Maurice. 



Le Dr. Bell s'exprime ainsi en 1887 : (Géologue de l'expé- 
dition). 

Une partie considérable du territoire, au sud de la Baie 
James, est propice à la colonisation. 

Les températures d'été et d'hiver ressemblent à celles du 
comté de Rimouski. Les étés ne sont point aussi chauds, ni 
les hivers aussi froids qu'à Winnipeg. 

Il y tombe en moyenne 3 pieds de neige, c-à d. beaucoup 
moins qu'à Québec. 

Les patates et autres légumes de terre y viennent bien. Le 
foin y pousse spontanément et d'une manière luxurieuse, l'orge 
y réussit et en un mot cette région est capable de produire 
tout ce qu'on peut produire à Rimouski. La région est aussi 
bien adaptée à l'élevage des bestiaux. 

Le pin blanc et rouge croissent dans la partie Sud du Moose 
factory, mais le bois le plus en abondance est l'épin'itte blanche 

6 



— 34 — 

et noire, l'épinette rouge, le cèdre bliiiic, bouleau, sapin et peu- 
plier. 11 y a aussi un [)eu d'orme et de frêne. 

Taimi le poisson que l'on trouve dans la Baie James est un 
beau poisson blanc, truite du Lac Supérieur, truite de mer, 
saumon, morue de rocho ( rock cod ). le ca{)liin, etc. ; à part 
des poissons strictement d'eau douce, comme la truite, le 
brochet, etc. 

Si l'on faisait un chemin de Quéqee à la Baie James, c'est 
l'embouchure de la rivière Rupert que l'on devrait viser. Un 
vapeur qui de là côtoierait la baie du Côté est aurait en été 
ses attraits pour les touiistes du Canada et des Etats-Unis. 
C'est ma propre expérience qui me porte à le déclarer. 



Voyons maintenant ce qu'eu dit le Rév. Père Laçasse que 
nous connaissons mieux pour l'avoir souvent vu au milieu de 
nous et assisté à ses conférences. 

Ce territoire est très propice à la colonisation et le terrain y 
est de première classe. Les patates et tous les légumes y 
réussissent. Le bœuf y est excellent. Le foin naturel y est 
en abondance. Les canards et les oies sauvages abondent au 
nord de Moose factory. On y tue annuellement 36,000 oies 
pour servir de provisions à la Cie. C'est là le nombre que les 
sauvages ont à fournir, 

L'éturgeon abonde dans les rivières ; et sur le littoral est, à 
30 milles de terre on trouve en g»ande abondance le marsouin 
et tous les poissons qui se rencontrent dans les eaux du golfe 
St- Laurent. 

Je n'hésite aucunement à recommander la construction d'un 
chemin de fer de Québec à la Baie James. Les indiens disent 
aussi que le terrain vers le Lac Mistassini est bien uni avec 
un sol argileux. 

Je crois que l'on pourrait comparer ce pays à l'Allemagne en 
Europe. Le climat ressemble à celui de Kainouraska, avec les 
mêmes fleurs et fruits sauvages, tels que framboises, fraises, 
groseilles, atakas, bois de genièvre etc. 



— 35 — 

A Moose factory il y n de. inagnifî<iue3 jardins. — La glace 
<|uitte les rivières à la fin d'avril et la baie est navigable du ô 
au 17 de mai, et ferme du 1er au 20 uove'ubre, L,a rnarëe la 
iilus haute est de 10 pieds. 

Sur trois luille huinmes — 100 vaisseaux à 30 hommes — 
j'en su[)po8e 1000 de mariés, chacun un logement ( un appar- 
tement, comme l'on dit à Paris ) de 3 à 5 pièces, un hangard 
j.onr le bois, une étable pour l;i vache, un jardin potager, une 
pièce pour hs patates ; et, partant de la première chute de la 
livièie liupert, car il faut à cet effet une hauteur peu considé- 
rable, le littoral étant presque à fleur d'eau de la baie, un aque- 
duc, un robinet d'eau douce par chaque famille. 

Les autres 2000 hommes seraient confortablement logés, qui 
dans leurs vaisseaux au port, qui dans leurs campements, et au 
lieu de passer tout leur temps comme on le fait ici à jouer aux 
dames, aux donjinos, exploiteraient en hiver ou durant leurs 
loisirs les superbes cariières de pierre ; le granit rouge dont je 
' ous ai parlé il y a uu' instant, et dont on ferait les solages, les 
cheminées, les fours à cuire, les fournaux à chaux, les fonda- 
tions d'un ou de plus d'un moulin à scie etc., les vidanges de 
la carrière pour le lestage des quais, et tout cela en dirigeant 
sur Québec, sur Montréal les beaux blocs de granit capables de 
faire des monuments, des édifices, des constructions quel- 
conques, faisant ainsi le profit du chemin, celui des ouviiers y 
employés, le bonheur de tout le monde. 

On y construirait de§ chaloupes ou radeaux pour aller à la 
cueillaison du foin, la fenaison de grève qui — je vous l'ai dit — 
vient spontanément ei arrosé qu'il l'est à chaque marée, a ce 
petit goût de salin que les animaux aiment tant. 



Si je possédais l'imagerie des mots, je vous en ferais, ce me 
semble, un portrait si ensoleillé que chacun de vous, chacune 
se croirait déjà en air d'y aller ; mais avant de partir, avant 
d'abandonner son chez-sci tout humble, tout pauvre qu'il puisse 
être, faut en venir à un calcul qui motive le départ. 



-36- 

Eh bien donc. Du lac St-.Toan au lac Mistassiiii 17o milles, 

de là à la baie James 207 milles — ensemble 380, ce qui à 

!§12,000 00 par mille (car le parcours e^'^t moins montuenx d»^ 

beaucoup que celui de.s Laurentides ) y compris Vdies d'évite- 

ment, télégraphe etc., S4,5GO,000 

20 stations, une à chaque 20 milles, cest suffisant 

pour commencer 10,000 

Equippement ou roulant — 19 locomotives à 

$10,000.00 190,000 

Wagons de première et seconde clauses, wagons à 
fret et à bagagn, chars plateformes, charrues à 
neige etc 57,000 

Ajouter pour usines, icservoirs, tables tournantes, 

chars à bras, hangarage ateliers, magasins, etc.. 183,000 



Coût probable du chemin $5^00,000 

Coût annuel du chemin : Intérêt à 5 o^o 
sur le coût du chemin porté à $5.000,000... $250,000 

Salaire ou gages des opérateurs de télé- 
graphe, gardiens des stations, ingénieurs, 
chauffeurs, conducteui'S, serre-freins $39,000 

10 hommes i)ar chaque section de 20 
ii.illes pour réparer la voie et la tenir libre 
déneige 40,000 

Gardiens des léservoirs... 4,000 

50 mécaniciens dans les usines 15,000 

Combustible soit pour les 19 engins ou 
locomotives 38,000 

Contingents et imprévu... 54,000 

180,000 

Coût annuel $440,000 

Sur ce coût annuel possible de $440,000, il est plus que pro- 
bable que l'on sauverait encore $40,000.00, dont $25,000.00 
On effectuant l'emprunt nécessaire à 4| 020 au lieu de 5 o^o, et 



— 37 — 

en économisant sur le transport d'hiver qui, vu la natuie de 
l'industrie, pourrait se réduire à une fois par semaine ou même 
moins que cela, de décembre à mars de chaque année. 

Installation de pêche 

100 vaisseaux équipés au complet avec chaloupe», instru- 
ments de pêche.agrès, de 300 tonneaux à peu près à $50.00 la 
tonne ou $15,000.00 chaque, plus pour 5 chaloupes chacune, 
réservoirs en fer pour l'huile, etc.,encore $15,00O.O0.S3,O00,00O 
Maisons pour 1000 familles de 10 logements 

chacune, 100 à $1,000.00 100,000 

Maisons ou campements pour les autres 2,000 hom- 
mes non mariés, à soit 20 par campement. 100 

bâtisses à $500 50,000 

Quais pour hiverner les vaisseaux dans un bassin 
avec espace dt, 100 pieds tout autour pour permet- 
tre l'action des glaces le long du littoral et des * 
jetées soit 30 de large 25 de hauteur bassin de 1000 
X 1000 pieds en dedans : 1000 x 1000 = 1 mil- 
lion de pieds soit à chaque vaisseau espace de 150 
X 40 =» 80,000 X 100 X 600.000 pieds sup. 
ajouter l'espace de 100 tout autour c'est-à-dire 
4,000 pieds de tour x 100 = 400,000 — ensem- 
ble 1,000,000 de pieds et donnant 4,120 pieds li- 
néaires de quai donne 1 14,444 verges cubes à $1.25 143,000 

Stables, hangars à bois etc. 200 à $100..... 20,000 

Poêles et mobilier 200 à $100 20,000 

Aqueduc soit 100,000 

Chapelle et sacristie et presbytère 10,000 

$3,443,000 

Montant rapporté $3,443,000 

Bureau de poste, écoles, mairie, contingents et 

imprévus soit 57,000 

Coût d'installation de la colonie $3,500,000 



-38- 
COL'T ANNUEL 

Intérêt sur le coût d'installation à 5o20 $175,000 

3,000 hommes à $20,00 par mois 
66^ centins par jour ou $240.00 par 
année $720,000 

100 vaisseaux, pour combustible à 
30 cordes chaque — 3,000 cordes à 
$2.00 6,000 

200 maisons,pour combustible à 100 
cordes chaque ou 16 cordes par famille 
et 25 cordes pour les camps, ensemble 
7,500 cordes à $2.00 15,000 

300 bœufs — par 10 hommes — 
])our l'ouvrage de la colonie à $30 9,000 

700 vaches à lait dont 200 pour les 
hommes à raison de 1 par 10 hommes 
500 pour les 1000 familles ou 1 par 2 
familiesà$30 21,000 

Nourriture pour 700 vaches et 300 
bœufs 1000 à $25.00 coût de cueilli.. 25,000 

796,000 

Intérêt sur coût d'installation $175,000 

Coût annuel, montant rapporté $796,000 

Ajouter po^ assurances,réparation8, 

etc.etc 29,000 

825,000 



$1,000,000 



BÉSUMÊ 

Coût annuel du ch. y compris int. sui le capital $500,000 
Coût annuel de la colonie des pêcheurs y com- 
pris l'intérêt sur le coût d'installation 1, 000.000 

Coût annuer total $1,500,000 

Dividende à lOo^o sur le capital $3,50 0,000du 

coût d'installation.... 850,000 

Coût annuel total $2,35U,UU0 



— Z9 — 

Nous avons vu que Gordon établit à $47,200.00 la cargaison 
du baleinier aux prix que se vendent actuellement l'huile, les 
fanons etc , mais pour partir sur une base plus certaine, prenons 
la moyenne $27,400 que l'on obtient en divisant par 50, ( le 
nombre dee cargaisons faites durant les onze ans antérieurs 
1874 ) les $1,371,000 valeur commerciale de la pêche de ces 
vaisseaux dans la baie d'Hudson, d'après le rapport des Com- 
missaires des pêcheries des Etats-Unis. 

Supposons encore que le profit net de la cargaison ne soit 
que de $23,500, laissant encore $3,920 pour couvrir les impré- 
vus du voyage, assurances etc., ceci seul nous donne les $235,- 
000 nécessaires pour couvrir les dépenses, intérêts et dividendes 
à rencontrer. 

Or comme il est admis qu'il y a deux pêches par année, celle 
du printemps et celle d'automne, il est de toute probabilité que 
les $23,500 de profits ci-dessus seront doublés et que les action- 
naires au lieu de ne toucher que 10 o^o de dividende sur leur 
mise, à part des 5 020 alloués pour intérêts,, toucheront plus du 
double de cette somme ou de 20 à 25 020 de profit sur leur 
argent. 

M. Light ingénieur consulte du Gouvt. de la province de 
Québec, m'assure avoir dit à l'Hble M. Garneau il y a tantôt 
20 ans, lorsque ce dernier était au ministère des travaux pu- 
blics que d'après lui, Light, le futur de Québec, était dans la 
direction de la Baie d'Hudson, et qu'il est encore tout à fait de 
cette opinion. 

M. Scott gérant du chemin de fer du Lac St-Jean, veut aller 
lui aussi à la Baie James ; mais en variant le parcours. Il 
recommande de continuer la ligne de la Rivière à Pierre jus- 
qu'au Lac Témiscamingue pour de là se rendre à la Baie James, 
en compagnie de Toronto ou d'Ontario qui dit il, et il le tient 
de l'ingénieur Bailey de Toronto, désire se joindre à Québec 
dans cette entreprise. 

Le chemin proposé par la Cie du Lac St-Jean a ses grands 
avantages sans doute, il passera par un pays riche en ressources 



— 40 — 

forestières et autres capables à elles seules de sustenter, de 
faire valoir la longueur additionnelle du trajet, en ouvrant 
ainsi l'intérieur du pays, toute la vallée de l'Ottawa (l'Outa- 
ouais). Ce trajectoire par Témiscamingue et Chapleau rac- 
courcieiait de 180 railles la distance des grands lacs à la mer et 
ce raccourci serait de 300 milles par le Sagueuay, St- Alphonse, 
Chicoutimi et le Lac St Jean si de ce dernier lac nous allions 
droit à Abittibi et de là au lac Supérieur ; et comme vous le 
savez plus on gagne le Nord, plus on s'éloigne des chaleurs de 
nos étés, et plus le grain du Nord-Ouest qui suivrait ce trajet, 
se conserverait en bon état, sous une température plus basse et 
un parcours plus succinct; mais tenons-nous en pour le présent 
au port de Québ-^c et à un chemin aussi court et direct que pos- 
sible entre Québec et la Baie d'Hudson, c-à-d. celui que je pro- 
pose, et qui n'empêche point les autres, celui dis-je par le lac 
St-Jean et Mistassini à la rivière Eupert, décharge de ce grand 
lac. 

Pourquoi, Messieurs, jusqu'à présent avons-nous toujours eu 
le frisson quand il s'est agi de la Baie d'Hudson, pourquoi 
toutes ces données favorables qu'on le sait aujourd'hui à la 
colonisation de la baie James sont-elles en flagrant délit de 
contradiction avec les rapports faits par les employés de la Oie 
— il n'y a aucunement à s'en étonner si l'on songe un moment 
à l'immense intérêt qu'avait, qu'à toujours eu et continue 
d'avoir la Oie. de cacher,de dissimuler.de faire la nuit autour de 
ses richesses:à l'instar de ce poisson de mer qui pour se dérober 
à ses ennemis lance un noir fluide qui l'enveloppe de toutes 
parts et que ceux qui le poursuivent craignent de traverser 
pour aller à sa rencontre. Cette Compagnie de la Baie d'Hud- 
son, elle feint de le nier, repousse de toutes ses forces un sur- 
croît de baleiniers dans ses parages, une colonisation qui ne lui 
laisserait point comme aujourd'hui son avoir tout entier des 
riches fourrures et autres ressources de cette fertile région. 

Oui j'avais le frisson moi aussi lorsque je lisais les rapports 
de la Oie. sur ce pays que l'on disait glacial jusqu'à ce que nos 
explorateurs, nos missionnaires fussent venus donner le dément 



~ 4' — 

à toutes ces histoires bien calculées pour refroidir le zèle, dé- 
courager ; et dailleurs, voyez donc Messieurs si la chose est 
possible en présence du fait que comme je l'gi moi-même véri- 
fié sur la carte du monde, cette latitude de la Baie James est 
précisément celle des Iles Britanniques : l'Angleterre, l'Irlandr, 
l'Ecosse ; celle même de Paris à très près et si ces pays sont 
quelque peu plus favorisés que nous dans nos parages c'est 
seulement parce que cette rivière d'eau plus chaude que celle 
de la mer qu'elle traverse, que lance le golfe du Mexique sous 
les effets d'un soleil tropical, ce " gulf stream " comme on l'ap- 
pelle qui se précipite sur l'Atlantique en sortant par la gorge 
eiitie le Cuba et la Floride, de cette vaste chaudière où l'eau 
gonflée nar l'effroyable température qu'il y fait se déverse du 
seul côté où il y a issue, ( comme la mélasse bouillante qui se 
gonfle au ctntre et se répand vers les bords du vaisseau 
qui la contient ) entraine avec elle comme le font tous 
les courants d'eau, une couche d'air qui dirigé avec 
le courant sur les côtes de l'Europe en réchauffe les flancs 
tout de même que sur une. plus petite échelle le courant d'air 
chaud qui dirigé sur vous après avoir seulement léché la sur- 
face de la glace dans le tombereau des familles vous earesse 
délicieusement la figure en vous rafraîchissant d'autant. 

Le français Messieurs ne connaissait i)oint son pays et le 
prussien le lui a enseigné. Nous ne connaissons point le nôtre 
n'attendons point que l'ennemi vienne nous faire voir notre . 
ignorance, llappelons-nous ce que Sir Edmond Head a dit de 
uous " La race inférieure. " 11 est temps de voir si nous 
allons ratifier ou démentir ses paroles. Hâtons-nous, je vous 
l'ai dit : déjà le Haut Canada, Ontario a commencé une voie 
ferrée qui du lac Nipissingue à Pariy Sound donne par la Baie 
Géorgienne dans le Lac Huron, et qui par Témisonmingue et 
Abittibi doit atteindre en 1894 la Baie James à Moose Factory, 
en route pour les pêcheries de la Baie d'Hudson. 

Nous n'avons que le même chemin à faire qu'eux pour nous 



— 42 — 

y rendre ou quelques milles de plus pour du Lac St-Jean 
toucher en passant à Mistassini et de là à l'angle Sud Est de 
la baie à Eupert Hose où la rivière de même nom vient déchar- 
ger ses eaux et qui* est à 120 milles de l'augle Sud Ouest de la 
même baie où va aboutir l'autre chemin de nos frères d'Ontario. 

Un coup de cœur Messieurs, le peuple est souverain, c'est 
lui qui doit imposer ses volontés à- ses députés, au Parlement 
qui sont là pour les faire valoir,. Des octrois sont déjà depuis 
plusieurs années acquis aux promoteurs des deux chemins qui 
de Winnipeg et de Nipissingue doivent se rendre à la Baie 
James, et cela de la paru des deux gouvernements le Fédéral et 
le Local, et tant en argent qu'en terres. 

Je l'ai déjà dit, Ontario est plus riche que nous, plus pros- 
père et a moins besoin que nous de chercher fortune ailleurs. 
C'est à vous tous à dire si nous allons continuer plus longtemps 
de nous expatrier ainsi tous les ans,et comme des milliers l'ont 
déjà fait en permanence, pour aller pétrir la boue de nos 
voisins, leur faire de la brique, la leur charrier sur nos épaules, 
frotter leurs bottes, leur servir en un mot de domestiques pen- 
dant qu'eux, plus fiers de leur intelligence nous passent devant 
pour pêcher dans nos eaux, nous voler notre patrimoine. 

Travaillons, Messieurs. Dieu a dit priez, c'est vrai, mais ce 
n'est point de cette prière contemplative qui comme la foi ne rap- 
porte tien sans les œuvres. Dieu a dit : aide-toi et je t'aiderai ; 
c'est donc la prière du travail qu'il veut, la plus efficace de 
toutes. Monseigneur Paquet le disait l'autre jour à la séance 
Universitaire de l'Académie St-Denis : le travail ne laisse 
point de loisirs pour les choses désavouables. Oui Dieu h dit : 
" tu gagneras ta vie à la sueur de ton front " — ma prière à 
moi en est une de 18 heures par jour, j'en donne 14 à mes de- 
voirs civiques, les quatre autres m'en dédommagent lorsque je 
puis les passer à vous écrire ces choses, à venir vous les dire.